vendredi 25 septembre 2015

La novice

Silencieuse, effacée, humble, mal fagotée
On la voyait parfois sourire aux anges vus
D’elle seule, dans l’ombre où des lueurs dorées
Glissaient sur le cours lent des psaumes tant relus
Par de paisibles voix. Mais voici qu’aujourd’hui,
Debout devant le père, elle recevait l’habit.
Il lui poussait soudain de grandes ailes noires
Qui la portaient, fervente, un cierge entre les mains,
Et la voyant si belle on avait peine à croire
Que ce fut là vraiment son choix que ce destin,
Car jamais ne parut de radieuse épousée
Resplendir autant qu’elle en sa sombre voilure
Qui portait en ses plis sa brillante figure,
Ainsi qu’un pain béni de lisse pâte ornée,
Et la fleur épanouie du cierge en ses mains blanches
Comme une frêle étoile en la nuit qui s’épanche.

Dehors sur le grand ciel, une lune aveuglante
Jetait des feux inquiets sur les astres épars.
Et de sourdes nuées courant de toutes parts
Mordaient le vide bleu de leurs gueules béantes.
C’était au firmament grandiose et ténébreux
Trop de lumière vive et de noir mouvement,
La froide frénésie des démons impudents
Qui venait obscurcir l’orbe effarée des cieux.

Et mon cœur se serrait devant cette splendeur
Inhumaine, terrible et soudain je pris peur.

Notre fragile église au tréfonds de la nuit,
Abritait en ses flancs la dernière lueur
Les derniers oiseaux blancs des mystères enfuis
Les derniers souvenirs des anciennes ferveurs
La secrète promesse avant les temps maudits
De guerre et d’injustice et de profond malheur
De l’aube irrésistible et du jour épanoui.



Au firmament d’été, l’étoile de Noël
Au bout de deux mille ans s’en revenait briller
Et je guettais le soir dans le gouffre du ciel
L’étincelant éclat venu nous annoncer
La fin. Le grand Retour. Le jugement dernier.
Dans l’illusoire paix du village assoupi,
Loin du fracas ferreux du monde abasourdi
Sous l’épais édredon des ultimes mensonges
Inconscient des démons acharnés qui le rongent,
J’entendais se lever de silencieux appels.



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