mardi 4 juillet 2023

Bref instant

 



 

Le bonheur d’exister, aquarelle fugace,

Aux couleurs délavées que le temps nous dérobe,

S’esquisse à chaque instant de notre course lasse,

Des premiers clairs regards dans les plis de ta robe,

Parfumée, chatoyante, ô merveilleuse Terre,

Jusqu’à ces derniers jours de la vieillesse amère,

Qui nous laisse rêver aux souffles du printemps,

Hagards et suspendus en ce fixe moment

Où notre vie s’étire, avant de s’effacer,

Nous laissant jouir enfin du matin retrouvé,

De notre enfance enfuie, des moments éternels.

Le vent qui passe encore et la fleur épanouie,

Et l’étoile qui luit dans la nuit infinie,

Du lointain rossignol le mystérieux appel,

Le chant méditatif et l’extase sereine

Qui mettent en nos coeurs la douceur et la peine.

Automne nordique

 


L’automne transparent

Semant ses monnaies d’or,

Comme aux sacres d’antan

Nous déploie ses trésors.

 

Et sur le ciel lavé

Passe un air déjà froid

Qui s’en vient préparer

Le retour des frimas

 

Et les frêles bouleaux

Aux diadèmes dorés

Se lancent des oiseaux

A partir déjà prêts

 

De tristes fleurs s’en vont

Frileuses et fanées

Des beaux jours moribonds

Déjà bien endeuillées.


Mon automne s’étire

Tardant à me laisser

Et chaque jour empire

Notre monde écharpé.

 

L’hiver qui nous arrive

N’aura pas de printemps

Sinon sur l’autre rive

Qu’il faut gagner à temps.

 

Trompette archangélique

Sonne donc au plus tôt

L’avènement mystique

Qu’attend notre troupeau

 

Ouvre tes grandes ailes

Michel au glaive d’or

Que renaisse sous elles

La terre mise à mort.

 


 

 

 



Solovki

 



 

Sur les flots ténébreux et crissant sous l’étrave

Vos cris épars s’en vont vriller la voix du vent,

Blancs oiseaux tournoyants aux remous du ciel cave

Qui soulevez mon cœur jusqu’aux confins du temps

 

A l’horizon béant, tel un grand coquillage,

Surgit la floraison du rude monastère

Sentinelles casquées et toujours en prière

Des coupoles dressées sur la marée des âges

 

Et ses remparts rouillés, trapus et fort solides

Qui n’empêchèrent point de le ronger les vers

De l’enfer engendrés, dévorant l’univers

Sous le regard absent des anges impavides...