Sous la cendre des ans couvait ce brasier rouge
Feu sourd de tourbière qui ronge, souterrain,
Les arbres dont les bras dans les étoiles bougent
Et qui croulent un jour dans les marais soudain…
La braise des amours qui n’ont pas pu flamber,
De la vie méprisée qui n’a pas enfanté
Se rongeant elle-même en son élan captif
Et furent sacrifiés tout ardents et tout vifs
Le corps avec le cœur sur l’autel froid des ans,
L’âme mystérieuse en leurs débris poussant
Une fleur inconnue et déjà presque éclose
Céleste, dévorante et silencieuse rose
En sa stellaire extase offrant un gouffre d’or
Aux semences d’ailleurs, libérées par la mort.
O suprême Poète, en l’abîme absorbant
De ton puissant amour prends-moi toute immature
Je suis toujours restée cet incurable enfant
Qui dès son plus jeune âge adora la nature
Sa terrible splendeur et ses philtres puissants.
Personne n’a voulu de cet amour sauvage
Qui vivace croissait comme la fleur des champs
Mais restait confiné dans cette triste cage
Qu’était pour lui mon corps délaissé et pourtant
J’avais des grands mystères la clé d’or et
l’accès,
Je savais les chemins des sources et des laves,
Leur pur scintillement et leurs brûlants secrets,
Dedans les gouffres noirs et les anciennes caves.
Je savais en naissant l’amour et ses merveilles,
Ses ténébreux dangers, ses splendides issues,
Ses souffrances pour moi demeurées sans pareilles,
L’extase qui toujours me restait défendue.
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