Il faudrait, comme on dit, enfin tourner la page
Commencer sagement à faire ses bagages
Dans la paix de ces ans qui seront les derniers,
A l’huis clos de ton cœur ne plus venir frapper
Et confier à Dieu le soin de te sauver.
Ne plus saigner de larmes à l’écho de ton nom
Et ne plus chavirer de vaine compassion,
De regrets impuissants ni d’espoirs épuisés
Devant l’amour défunt que nous avons veillé,
Cet amour avorté dont tu n’as pas voulu
Et qui reste entre nous comme un enfant perdu.
Il nous faudrait tous deux cesser de le bercer
Quand il pourrit déjà sans plus d’utilité,
Et c’est sans doute là ce que tu voudrais dire,
Toi qui nous l’as tué, et c’est encore le pire,
Car toi seul tu pourrais nous le ressusciter.
Mais trop lourde est ta croix
Et depuis trop longtemps
Avec si peu de foi,
Tu la traînes pourtant,
Et de forces en toi
Ne reste pour l’instant
Que d’aller pas à pas
Ainsi bon an mal an.
Quand à moi, j’ai la mienne et parallèlement,
Tous deux en trébuchant, nous portons nos parents.
Moi je prie, toi tu bois, et je prierai encor
Sans me lasser jamais, pour toi vivant ou
mort ;
Car je sais que ton âme tient au fil de ces mots
Que la mienne dévide au seuil de nos tombeaux
Et que les deux moitiés de nos êtres jumeaux
De nos voix réunies feront un seul oiseau.
Laurence
Guillon Moscou 2012
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