jeudi 4 janvier 2024

Ville morte

 

 


Sous son triste étendard, endormie dans ses ruines,

La ville nonchalante et déserte rumine

Le souvenir latent de son charme passé,

Et celui plus cuisant des crimes inexpiés.

 

Paysans et marchands, prêtres et officiers,

Mêlant leurs sangs divers dans les mêmes fossés,

Hantent encore parfois ces rues mélancoliques,

Où leurs maisons blessées ont laissé ces reliques.

 

Et l’on pourrait saisir, dans le cri des mouettes,

Les plaintes déchirées des filles assourdies,

Qui couraient sur la grève après toutes vos têtes,

O guerriers fauchés par des lames salies.

 

Dans les rues sans issue glissent des pas d’enfants,

Cherchant les cailloux blancs des destins saccagés.

Ils lèvent au ciel vide des yeux exorbités,

Guettant les messagers des espaces béants.

 

Aux fenêtres des ans, leur jeunesse se lasse,

Sans porter de fruits d’or ni déployer ses ailes,

Leurs lendemains sont sourds et leur présent se casse,

L’éternité s’enfuit loin de leurs âmes frêles.

 

Il est temps de sourire aux anges de passage,

Qui traversent brillants les gouffres de la nuit,

Il est temps d’appeler de tous vos coeurs flétris,

Les lumineux oiseaux qui portent leur message.

 

J’entends leur bruissement et je suis leur trajet,

A travers notre bruit, leur silence fatal,

Sous la suie de nos jours, leurs radieux secrets

Dont nous avons souvent perçu l’éclat si mal.

 

Quand la chair de la vie fondra dans le néant,

De trouver des issues il ne sera plus temps,

Des ombres, des esprits,  des démons et des anges,

Rien ne cachera plus les présences étranges.

 

Les animaux errants, cherchant leurs maîtres morts,

Les beaux arbres tranchés et les fleurs piétinées,

Surgiront à nouveau sur les quais de ces ports,

Où titubent sans but les âmes aveuglées.

 

Elles se souviendront, levant haut leurs grands bras,

Des danses égarées sur les places sanglantes,

Des discours insensés, des fêtes indécentes,

Des églises brûlées sous des cieux pleins d’effroi.

 

 

1 commentaire:

  1. Je me souviens d'un figuier malingre cramponné entre deux pierres. Trajet SNCF Toulouse/Nice. J'y rejoignais mes parents. C'était il y a longtemps. Votre poème chuchote des bribes de ce voyage. Depuis lors ce figuier fugueur me tient compagnie tel un ange de passage. C'est drôle ! Bien à vous Jos

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