Près
de nous se dressait un grand Christ douceâtre
Dans
les reflets rosés de sa robe de plâtre,
Montrant son cœur à nu de ses doigts repliés
Que
d’un regard inquiet tu regardais bouger.
Et
j’aurais bien voulu qu’ils bougeassent vraiment,
Que
dans ses bras ouverts, ma pauvre chère
maman,
Il
te prît aussitôt pour t’emporter là bas,
Où
sont partis les gens que tu crois voir chez toi.
Nous
n’avons pas pu boire encore jusqu’à la lie,
Le
calice trop amer de cette maladie.
Nous
n’avons pas gravi jusqu’au lointain sommet,
L’aride
Golgotha qui nous fut préparé.
Et
nous allons de pair, toi et moi, pas à pas,
Dans
cette contrée floue que tu ne connais pas.
Soleil
de mon matin, tu n’es plus que la cendre
De
ta vie consumée qui s’éteint sans m’attendre.
…
Sous
les grands arceaux nus de cette vieille église,
Marthoune
reposait dans sa barque scellée.
Sur
le point de partir, fallait-il qu’elle nous dise,
Lasse
depuis longtemps des jours qui s‘éternisent,
Vers
quel rivage étrange elle s’était
embarquée.
Et
nous, depuis le quai, au travers du brouillard,
Ne
distinguons pas bien les lointains obscurcis,
Vers
lesquels à ton tour tu vas partir aussi,
Comme
tout un chacun doit le faire tôt ou tard.
A
la vie qui s’enfuit, tu tenais bien pourtant,
Et
tu vas recueillant ça et là tournoyant,
Les
reflets qu’il t’en reste dans ce vent ténébreux
Qui
les prend et les jette et ne laisse rien d’eux.
La
vie, la douce vie de jour en jour coulant,
Du
matin jusqu’au soir, de l’hiver au printemps,
Le
rire des enfants et les mots qu’on échange,
La
fleur qui s’épanouit et le pain frais qu’on mange,
Et
les oiseaux qui passent et les chats assoupis,
Les
courses, le jardin, les repas entre amis,
De
jour en jour coulant, le sable des instants
Est
à présent compté.
Il
en reste si peu
Que
voici le dernier,
Celui
qui mène à Dieu,
Et
va nous séparer.
Il
va nous séparer, mais pour bien peu de temps,
Sortons,
ma chère maman, de l’église endeuillée.
Au
dehors le mistral essorant les nuées
Nous
lave un grand morceau d’azur étourdissant,
Où
des constellations d’oiseaux avec lenteur
Filent
leurs astres blancs dans sa claire rumeur.
Comment
croire à la mort devant le dais glorieux
Que
déploie la lumière après ces funérailles,
Devant la liturgie que célèbrent les cieux
Repoussant
les vantaux de la froide grisaille?
Ce
sont là haut nos anges qui nous font ces grands gestes,
Tracés
dans la splendeur du soir déjà doré,
Et
c’est le courbe éclat de leur envol céleste
Qui soulève nos âmes et vient les consoler.
Pierrelatte
décembre 2011
Bonjour
RépondreSupprimerTrès beau poème qui introduit une lueur de tendresse dans le coeur.
Amicalement